Le Conseil constitutionnel du Cameroun a proclamé Paul Biya, âgé de 92 ans, vainqueur de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025, prolongeant ainsi son règne de quatre décennies. Ce résultat intervient dans un contexte de vives manifestations et d’appels renouvelés, notamment de la part des dirigeants chrétiens, pour défendre les « valeurs démocratiques et morales » profondément ancrées dans la foi chrétienne.


Le président, déjà le plus vieux chef d'État en exercice au monde, a obtenu 53,66 % des voix, tandis que son principal rival, l'ex-allié Issa Tchiroma Bakary, en a récolté 35,19 %. Le taux de participation officiel s’élève à environ 57,7 %, selon les autorités, rapporte Worthynews.

Des manifestations ont éclaté dans plusieurs grandes villes, dont Yaoundé, Douala et Garoua, après l’annonce des résultats. Les affrontements entre forces de sécurité et manifestants ont fait au moins quatre morts et de nombreux blessés, les protestataires réclamant un nouveau comptage des voix. Tchiroma a accusé l'armée de tirer sur des civils à Garoua, affirmant sur les réseaux sociaux : « Tuer à bout portant vos propres frères… Si vous voulez me tuer, faites-le, mais je libérerai ce pays par tous les moyens nécessaires. »

Avant le scrutin, l’Alliance des Évangéliques du Cameroun (AEC), qui représente près de sept millions de chrétiens évangéliques, avait qualifié cette élection de « moment charnière de la mobilisation démocratique ». L'AEC a appelé les Camerounais à défendre « les valeurs démocratiques et morales » et a souligné que le président doit être un artisan de paix, un rassembleur pour tous, sans distinction d'affiliation politique, religieuse ou ethnique.

Dans une déclaration cosignée par les révérends Teyabe Alphonse et Jean Libom Li Likeng, l’AEC a rappelé que « toute autorité vient de Dieu » et a appelé les dirigeants politiques à instaurer un respect total de Dieu dans les affaires publiques, tout en rejetant la corruption, le népotisme et les divisions. Citant Isaïe 60:1-5, l’AEC a encouragé à « restaurer l’espoir et l’essor de l’Afrique ».

La réélection de Biya intervient dans un climat de frustration généralisée, marqué par la corruption et les crises multiples. Selon Transparency International, le Cameroun est classé 140e sur 180 pays dans son Indice de perception de la corruption 2024.

Les combats entre forces gouvernementales et séparatistes dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ont fait plus de 6 000 morts et provoqué environ 580 000 déplacés internes. En outre, les violences liées à Boko Haram dans le nord ont fait plus de 3 000 victimes et déplacé 250 000 personnes, selon les Nations Unies et Human Rights Watch.

Dans ce contexte difficile, les responsables religieux ont appelé à la réconciliation, soulignant que l’instabilité croissante menace le tissu moral et social du pays. Les données officielles montrent que plus de 70 % des 30 millions de Camerounais ont moins de 35 ans, un chiffre qui reflète un profond fossé générationnel. La réélection de Biya met en lumière ce clivage entre une jeunesse contestataire et des dirigeants vieillissants.

Lors d’un de ses rassemblements de campagne à Maroua, Biya a promis de « renforcer la sécurité, lutter contre le chômage des jeunes et améliorer les infrastructures ». Reconnaissant les frustrations du peuple, il a déclaré : « Je suis conscient des problèmes qui vous préoccupent, et je sais que ces défis ne sont pas insurmontables. »

Alors que les manifestations se poursuivent, les leaders religieux du pays ont appelé au calme et au dialogue. La Commission électorale africaine (AEC) a conclu : « Nous prions pour que le Cameroun puisse avancer dans la paix, l’intégrité et la foi en Dieu. »
 

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