Un vent de contestation souffle au sein des communautés religieuses en Côte d’Ivoire. L’Église Méthodiste de Côte d’Ivoire, la Fédération Évangélique de Côte d’Ivoire et le Consistoire des Protestants Évangéliques montent au créneau contre l’ordonnance n°2024-368 du 12 juin 2024 relative à l’organisation de la société civile, en passe d’être ratifiée par le Parlement. Pour ces institutions religieuses, certaines dispositions du texte menacent la liberté de culte et vont à l’encontre des principes fondamentaux garantis par la Constitution.
Réunis dans la commune du Plateau à Abidjan, ce mardi 4 mars 2025, les représentants des principales confessions évangéliques du pays ont lu une déclaration solennelle pour exprimer leur profonde inquiétude face à cette ordonnance et interpeller les autorités.
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Au cœur de la polémique, plusieurs articles de l’ordonnance qui imposeraient un contrôle étatique sur les communautés religieuses. Les articles 47 et 48, en particulier, exigent des organisations de la société civile – y compris les Églises – de rendre des comptes aux autorités, de soumettre des rapports d’activité annuels et de permettre des inspections de leurs infrastructures. Une obligation jugée inacceptable par les leaders religieux.
"Dans un État laïque comme la Côte d’Ivoire, le principe juridique de séparation entre la société civile et la société religieuse, qui implique la neutralité de l’État à l’égard des confessions religieuses, doit être respecté. De sorte que les communautés religieuses doivent être exclues de ce chapitre pour éviter des tensions inutiles entre les principes religieux et les pressions politiques et, surtout, ne pas donner l’impression, avec ces dispositions, d’une ingérence politique", dénoncent-ils dans leur déclaration officielle.
Autre point de discorde : l’article 79 qui interdit la construction d’un lieu de culte à moins d’un kilomètre d’un autre édifice religieux d’une obédience différente. Une mesure qui, selon les responsables religieux, risque de compliquer l’implantation de nouvelles églises, notamment en milieu rural.
Au-delà de ces obligations administratives, les Églises s’inquiètent d’une restriction de la liberté d’expression religieuse, notamment avec l’article 77 qui impose aux guides religieux étrangers de déclarer toute prise de parole publique un mois à l’avance. Une contrainte perçue comme une atteinte à la liberté d’organisation des cultes.
Les signataires de la déclaration rappellent que la liberté religieuse est un "droit fondamental universel", consacré par la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, ainsi que la Constitution ivoirienne.
Face à ces inquiétudes, les responsables des Églises évangéliques exhortent les députés à ne pas ratifier l’ordonnance en l’état. Ils plaident pour un dialogue entre les autorités et les communautés religieuses afin d’aboutir à un texte plus consensuel.
En attendant, ils appellent les croyants à la prière pour la paix et l’unité nationale, tout en mettant en garde contre les divisions que pourrait provoquer cette réforme.
Par la voix du révérend-docteur Noël N’Guessan, les trois entités ont rappelé que les communautés religieuses jouent un rôle essentiel dans la cohésion sociale et le bien-être des populations et que toute législation qui risque de limiter leur action doit être examinée avec la plus grande prudence.
Alors que la Côte d’Ivoire se prépare à une année électorale sensible, cette prise de position pourrait peser lourd dans le débat public.
La déclaration Intégrale
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Eliakim
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