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Date de publication : jeudi 29 janvier 2015 - "Le délit de blasphème n’est pas dans la loi"![]()
Non. Le protestantisme opère une désacralisation des lieux, des temps et des institutions.
Comme celle des limites de la liberté d’expression, cette question doit être considérée suivant les différentes configurations où elle se pose : la religion caricaturée est-elle la mienne ou celle des autres ? Cela a-t-il lieu dans un cadre privé ou public ? Qui décide s’il y a ou non caricature, insulte ou blasphème ? Y a-t-il des lois, une justice qui définissent ces termes et condamnent les paroles et les actes concernés ? Enfin, dans quel environnement socio-économique cela se passe-t-il ? Tous ces niveaux – et d’autres – s’entremêlent, ce qui rend la question complexe et appelle des réponses différenciées, voire contradictoires, selon les circonstances et les interlocuteurs. Le protestantisme peut se comprendre comme un affranchissement du sacré, une désacralisation des lieux, des temps, des personnes, des institutions, de la Bible… Seul Dieu est saint, même ses noms, ses représentations plastiques ou doctrinales ne le sont pas. De ce point de vue, il n’y a aucune limite à la caricature de toutes les religions. Ces caricatures peuvent être pertinentes ou bêtes, drôles ou méchantes, elles feront réfléchir ou agaceront en pointant une faiblesse, la mienne ou celle des autres. On peut en rire, les ignorer ou les discuter, Dieu et ses prophètes sont au-dessus de ça ! Mais, parmi mes frères chrétiens, juifs, musulmans ou autres, il y a ceux pour qui il n’en va pas ainsi. Si je veux entrer en dialogue avec eux, il me faut prendre en compte leur ressenti. Dans ce dialogue interreligieux, je pourrais comprendre la position de l’autre à l’égard du sacré et témoigner de la mienne, mais je ne peux exiger son acceptation de la caricature comme préalable à la discussion. Il y a aussi le cadre républicain laïc dans lequel les religions et les philosophies sont reconnues sans en favoriser aucune ; bien que l’universalisme hérité de l’Évangile paulinien et des lumières soit – à juste titre – un des piliers non négociables de notre vivre ensemble. Dans cet espace public, la liberté d’expression est légalement encadrée par l’interdiction de la diffamation, du racisme et de l’antisémitisme, de l’appel à la haine ou à la violence, de l’apologie du crime… Il n’y a pas – et c’est heureux ! – de délit de blasphème dans la loi française, n’en déplaise à ceux qui dans le monde vocifèrent, donnant de leur religion une piètre caricature. Il existe bien un délit d’injure publique, les tribunaux ont parfois à en juger. Pourtant l’insulte ressentie n’est pas effacée par une délibération judiciaire. Au-delà du rapport au sacré, si ce sentiment d’être insulté dans sa foi est souvent si violent, cela ne tient-il pas aussi à une situation économique et sociale subie ? Quelle est la véritable insulte, la vraie humiliation faite à beaucoup de musulmans et à bien d’autres populations exclues, marginalisées ? Cette insulte va bien au-delà de quelques coups de crayon. Mais il se trouve qu’elle est plus diffuse, moins immédiatement identifiable. Il faut une conscience politique pour la nommer et la dénoncer. Faute de quoi la frustration ressentie par beaucoup trouvera à exercer sa vindicte facile et meurtrière contre des traits de plume impertinents, mais en se trompant tragiquement de cible. retour QUE PENSEZ-VOUS DE CET ARTICLE
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